Nouveauté cette année, nous doublons le chiffre des
participants dans la catégorie. Un mois avant la course, 6 TBikers ont
confirmés leur présence. Florence, Christophe, Fabrice, Dexter, Jeff, Thierry (l’incontournable) et moi devrions être
sur la ligne de départ. Ma préparation physique a été nulle cette année (comme d’hab ?) hormis des séances
de musculation spécifiques pour les jambes (mes
éternels problèmes de crampes).
Pour
l’occasion, on me prête une FB Track. Un modèle léger qui devrait m’aider sur
une très longue distance. La même que celle utilisée lors des Championnats du
Monde VPH en 2006. Nous sommes le 26 Septembre.
Le Marathon
10h ! POUET !! C’est parti !! Nous nous
lançons dans un sprint de départ sur plusieurs centaines de mètres histoire
d’avoir une avance confortable. Nous avons 2100 coureurs aux trousses … Ceci
étant fait, nous pouvons garder un rythme plus ou moins rapide sans avoir à
angoisser et regarder trop souvent derrière nous. Nous poussons entre 15 et 20
km/h la première partie. Le 10km en 33’ (rapide
pour un 100 !), le semi en 1h13’ (trop
rapide aussi à mon goût). Le Marathon sera une belle ballade sportive. La
route est toute à nous et nous commençons à prendre de la vitesse sur quelques
descentes. Les quelques côtes sont poussées en pleine bourre. Il fait beau, par
endroit un peu frais, température idéale. Nous profitons du paysage magnifique
des Gorges de la Jonte. La rivière coule au bas de la route et au dessus les
falaises nous dominent offrant leurs façades au soleil. Ici c’est un des hauts lieux de l’escalade
dans la région. Je passe le semi en tête
avec Thierry en sprintant la petite côte. Les trottinettes offrent le
spectacle. Sept Footbikes ensemble, ça a de la gueule !!
Arrivée au Marathon en 2h36’. Le passage de la ligne se
fera en sprint entre Dexter et moi. Comme quoi on en a encore dans les
pattes !! Mais il nous manque Jeff. Introuvable. Florence et Fabrice qui
était dernier nous ont rejoints sans le doubler. Est-il passé dans la 15ème
dimension ? Nous prévenons l’organisation qu’il nous rejoigne ou nous
attende au choix.
Deuxième boucle
Après un bon ravitaillement, nous repartons pour la
deuxième boucle. Le premier coureur vient de passer (en 2h45 au marathon !! et il part pour 60km de plus …). A la
sortie de Millau, nous le doublons, il vient de craquer et s’est arrêté
accroupis sur la route…
La
côte de Creissel. Première grosse difficulté. Les deux dernières fois, c’est là
où les crampes sont survenues et cette fois ci pas d’exception à la règle. Dès
que je mets pied à terre, ça commence. Tous les autres sont loin devant. La
dernière du groupe de tête (Florence)
disparaît à l’horizon en marchant. Je me retrouve tout seul. La chaleur
commence à s’installer. Il est presque 13h. J’atteints péniblement le sommet. Chrono :
3h. Le premier vient de me passer. En haut, personne de ma bande, ils ont dû
foncer comme des fous dans la descente qui suit. Je m’y attelle et profite de
la longue descente pour friser les 60 Km/h et reposer mes muscles. Allongé sur
l’avant de la Trot, le vent siffle dans mon casque et je repasse le premier
comme une flèche.
Je rejoins Dexter et Florence sur un ravitaillement.
Nous sommes sur une large nationale déserte qui rejoint St Rome. Nous roulons
de front tous les trois pendant plusieurs kilomètres. Je recommence à avoir mal
à chaque poussée, mais je tiens le coup. On ne va pas trop vite. Dexter nous
raconte l’Ultra Trail du Mont Blanc, le Marathon des sables. Je rappelle que ce
mec « vaut » 1h37’ au marathon
en trottinette !!
On attaque la célèbre et redoutable côte de Tiergues. Dexter
file en poussant suivie par Florence qui met pied à terre. Je les vois au loin.
Je pousse un peu mais rapidement je m’arrête et me met à marcher. Tout à coup,
une douleur fulgurante me transperce la cuisse gauche. Une crampe monstrueuse,
puis même chose à droite. Les adducteurs s’y mettent, puis les ischio. Ma jambe
droite est bloquée je ne peux plus la plier. C’est horrible. Je ne peu pas
bouger, j’ai trop mal. Même à l’arrêt j’ai l’impression que les muscles
gonflent tellement qu’ils vont s’arracher de la jambe.
Accroupi sur le guidon de la trottinette, je pleure en
serrant les dents. J’ai mal. Je ne peux plus bouger. Dieu que j’ai mal … La
route est déserte, il fait une chaleur de plomb. J’enrage. J’ai l’énergie, le
souffle, ce sont les muscles qui lâchent. Je ne sais pas si c’est de rage ou de
souffrance que je pleure. Une voiture de gendarmerie arrive et s’arrête. Le
gendarme sort et viens vers moi. « Monsieur,
ça va ? » Je lève la tête « non, mais ça va passer, ce sont des crampes ». « Vous voulez pas venir avec nous ? »
« Non, merci ça va aller, j’attend
que ça passe, merci ». Il s’en va. Je prends un gel anti-crampes de
plus, je bois, je m’arrose. Je me suis arrêté à l’ombre. Je pense à l’abandon.
Après tout je pourrai faire demi-tour ici. Non, je serre les dents, je respire
à fond et enclenche le processus mental : Je suis le plus fort ! Je
passe outre la douleur. Je me donne un objectif. Le sommet de la côte. Je dois
arriver au sommet. Si j’atteints le sommet à quatre pâtes et en souffrant le
martyr, j’abandonne. Promis. Je n’irai pas plus loin. J’aviserai là haut. Je
repars doucement, ça se calme. J’arrive finalement à marcher sans trop avoir
mal. C’est étrange comme crampes. Elles vont et viennent. Montent en puissance
puis repartent. Un coureur (le troisième)
arrive seul derrière moi. J’ai beau être à l’agonie, je lui propose ma gourde
d’eau qu’il accepte bien volontiers, sa femme qui le suit à vélo est loin
derrière. « Je te la laisserai au
bord de la route ». Il boit sans s’arrêter. Je récupère ma gourde et
arrive enfin au ravitaillement du sommet. Les deux premiers concurrents sont
déjà dans la descente. Je prends un coca et repars rapidement. J’ai 6 km de
descente devant moi, je me reposerai en bas. Afin de calmer mes muscles je
descends sans trop de recherche de vitesse. J’oscille entre 50 et 60 km/h
pendant presque 10 minutes. J’essai de ne pas plier les jambes pour que les
muscles ne soient pas sollicités outre mesures. Je croise Christophe et Fabrice
qui sont presque au sommet puis Dexter, Thierry et Florence au bas de la côte.
J’arrive enfin à St Affrique.
Le retour
St Affrique : 5h de course dans les pattes. Je
refais le plein d’eau, prend un bon ravitaillement et réattaque à la côte. D’emblée je me mets à
marcher, la pente est trop dure. Je me suis préparé mentalement. Je sais que ça
va durer près de 6 km et qu’avec mes crampes je cours un gros risque. Mais je
compte sur le repos de la descente pour faire son effet. Je m’hydrate sans
arrêt. Sur la nuque, les jambes. Je marche aussi en fonction. Doucement. 4 km/h
au compteur. Les concurrents commencent à arriver en face. Je salut je coureur
à qui j’ai passé ma gourde tout à l’heure. Sa femme est revenue. Grand signe de
la main de sa part. Le pick-up d’ouverture arrive lentement à mon niveau. Le
premier coureur pointe son nez. Le pick-up reste un petit moment avec moi, je
discute avec les chauffeurs. Le fait de discuter de choses et d’autres me fait
oublier mes jambes. Le premier me passe avec sa « cour ». Une dizaine de vélos sont avec lui. Il disparaît
lentement au loin pendant que je continu à marcher lentement. La pente diminue
et je tente une poussée, puis deux, puis trois. C’est reparti, je me relance
enfin entre 10 et 12 km/h sans forcer sur mes muscles. Une sorte de poussée à
l’économie. J’arrive à diminuer mon retard sur le premier. Je reviens
lentement. Je finis par le dépasser lors d’un effort intense. J’en bave
vraiment mais ma machine (le corps humain)
fonctionne parfaitement. Je remonte à 15 km/h. Le sommet de la côte arrive
enfin. 5h40’. Dès mon arrêt, les crampes reviennent. Je me repose un peu, tente
des étirements mains cela ne sert à rien les muscles sont complètements étirés
et endoloris. Chaque tentative d’étirement se solde par un déclenchement de
crampes sur l’autre jambe. Mais je sais maintenant que les 15 prochains
kilomètres seront en descente. Je vais reposer les muscles pour la dernière
côte. Le premier viens de passer (avec un
salut du pick-up J). Je descends la côte de Tiergues en me souvenant du
moment que j’ai passé tout à l’heure. Maintenant il y a un monde fou. Ca monte,
ça monte. Je redouble mon ami le pick-up « Je suis encore là !! » Rires des chauffeurs. Au bas de la
côte je vois tout à coup Thierry assis au bord de la route, roue démontée, pneu
dans la main, il a crevé à l’arrière. Il se bat avec une rustine qui a décidée
de jouer les rebelles. Je décide de continuer et de l’attendre sous le viaduc.
S’il ne peut pas me rejoindre, il m’appellera et je reviendrai le chercher en
voiture. Je reprends la longue route monotone qui me mène en bas de la dernière
difficulté. Je reprends ma marche forcée sous le soleil qui tape fort. Il est
presque 17h. Je fais attention à la manière dont je marche et les crampes ne se
déclenchent pas. Les quelques kilomètres passés sans trop pousser m’ont fait du
bien.
7h de course. Sommet de la côte de Creissel sous le
Viaduc. Je rejoints le groupe avec le premier concurrent qui me double juste
avant le sommet. Ils m’attendent depuis un bon moment déjà. Dexter a déjà filé
pour rejoindre l’arrivée. Il fait très chaud. Jeff a réapparu, il s’était perdu
à un croisement pendant le marathon. Comme quoi je ne suis pas le seul à rater
les virages (voir toutes les courses
précédentes !!). Comme j’ai décidé d’attendre Thierry, je dis au
groupe qu’ils peuvent filer vers l’arrivée. J’en profite pour me ravitailler et
me reposer. Je reste là assis, un peu hagard en regardant les gens qui montent
la côte en marchant. Ils sont seulement au 50ème kilomètre et il est
17h. Ils en ont autant à faire. Hallucinant. Thierry arrive au bout de dix
minutes. Son pneu arrière se dégonfle sans arrêt il doit remettre de l’air tous
le temps. Nous nous lançons dans la célèbre descendre des records. 1,2 km à 7%
tout droit. Thierry, vu son pneu arrière ne préfère pas foncer, quant à moi, je
passe à coté de deux cyclistes habillés façon tour de France (c’est fou comme les amateurs ont plus de
sponsors sur leurs maillots que les vrai pros …). « Dis donc ton truc ça doit être plus facile
en descente qu’en montée non ? » « Aouaip ! Asseyez de me rattraper pour voir !! » Je
me cale le torse sur le guidon, la tête au dessus de la roue avant, les genoux
coincent le cadre et je file dans la pente. Ils ne me rattraperont pas. 71,8
km/h, mon record n’est pas battu, mais j’ai eu une grosse montée d’adrénaline
pendant quelques minutes. En effet la Fb Track est trop légère pour ce genre
d’exercice. La stabilité n’était pas vraiment au rendez vous et la fourche
droite entamait un guidonnage pas rassurant. Il m’a fallu serrer le guidon de
toutes mes forces pour maintenir la machine en ligne.
J’attends Thierry au sommet de la petite côte qui suit
et nous terminons les 5 derniers kilomètres doucement avec « arrêt-gonflette-pneu » nécessaire.
L’entrée dans Millau est terrible, j’ai des crampes qui se déclenchent à chaque
mouvement de jambe. C’est très douloureux. Je sais que je vais finir, mais
impossible d’accélérer. Km99 nous apercevons au loin le pick-up d’ouverture de
course. Quoi, serait-il possible de le rejoindre pour au moins finir avec le
premier ? Nous accélérons un peu et finissons par arriver à la porte du
parc en même temps que le premier concurrent. Pendant qu’il monte la grande
allée où se trouve le finish, nous monterons une contre allée en parallèle.
Pendant que nous poussons Thierry et moi côte à côte, je vois le gagnant
entouré des enfants de l’école d’athlétisme qui monte vers sa victoire en même
temps que nous. Nous passerons la ligne (fictive
pour nous) en même temps. 7h50’ !!
Par rapport à l’an dernier, j’ai le même temps de
roulage (6h50’). La différence se
fait par les temps d’arrêts. Plus d’une heure cette année contre 45’ l’an
dernier. Mais de toute manière je sais maintenant que je « vaut » 6h50’. Dans l’absolu, si je
fonçais sans m’arrêter, je ferai ce temps. Le but de l’entraînement pour le
futur sera de réduire les temps d’arrêts en conservant ces 6h50’. Me rapprocher
des 7h. Dexter quant à lui pense que la barre des 5h est cassable … gulp !
Allez, à l’année prochaine …
Ps : Je me rendrais compte le lendemain en
rangeant mon sac que j’avais avec moi une bombe anti-crevaison au cas où
…. Dois-je le dire à Thierry au risque de me faire maudire ?