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dimanche 8 octobre 2006

Roc D’Azur


Mal dormis. Comme la veille de chaque courses. Peut-être trois heures en tout ? Mais mal. Je ne m’inquiète pas, ce n’est pas le repos de la nuit précédente qui compte. Pour la « Cap Nore » c’était pareil.
La veille au salon du Roc, j’ai acheté des dosettes de gel énergisantes. Je n’ai jamais essayé ses trucs là, mais j’ai trop peur des crampes dont je suis sujet et je n’ai pas pris mon ravitaillement de secours. Comme j’ai pour principe d’être en autonomie au cas où, il me faut absolument quelque chose. J’opte pour ces trucs. Je vendeur me fait un échantillonnage. 1 type de dose pour le départ, puis 1 autre type toutes les 45’ (dosette spécial raid longue distance) et une « Turbo » en cas de chute de pression. Avec ça, pas besoin de s’arrêter aux ravitaillement me dit il. Comme on le verra par la suite, j’ai été inspiré.
Le départ se présente. Toujours les mêmes remarques autour de la machine, certains rigoles, d’autres sont intéressés, etc … le speaker annonce les 5mn avant le top, je prend ma dosette. Je suis dans la dernière vague de plusieurs centaines de coureurs. Départ à 11h45. Les premiers ont démarrés à 10h. C’est partis !! J’arrive à tenir à peu près tête à la meute sur la grande ligne droite du départ. Le gazon est assez roulant et je prend tout de suite un bon rythme. Les VTT me doublent lentement. Moi qui croyais me faire pourrir d’entrée … je ne sors pas dernier de cette première phase. Bon signe. Ensuite les choses sérieuses commences. Beaucoup de gens derrière moi et quelques uns me doublent pas trop fort. On est sur du roulant et je tiens (à vue de nez) un bon 15km/h de croisière. On attaque la première côte. Pied à terre (comme beaucoup) et on démarre se qui sera la majorité du parcours : la marche forcée. Des vélos passent à fond, d’autres la joue raisonnable, ne pas se pourrir d’entrée. Puis les premières descentes énormes ou le FB passe comme une fleur, la position des pieds en parallèle me rappelle la godille en ski. Dès le sommet de la première longue côte, le paysage est époustouflant. Vision de 180° sur les Maures, St Raphaël, Fréjus, la Mer tout le long. Le premier ravitaillement est atteint en 1h (11km). C’était roulant. Je recharge la flotte (j’ai pris ma dosette magique). Il y a un monde fou. Ca discute, rigole, on est qu’au début. Mon objectif est de ne pas être dernier du tout. Je ne veux pas fermer la course vue mon allure, je repars rapidement. On enchaîne la marche, les parties roulantes et les descentes parfois violentes. Le FB s’en sort magistralement. Les trous sont avalés grâce la fourche avant et la machine reste stable. J’atteint même des vitesse très (trop ?) rapide. Le freinage étant à la hauteur, on prend de plus en plus confiance en soi. Mais nous sommes très très nombreux (+ de 4000 …) et un accident grave va nous bloquer au bout de deux heures de course pendant 45’. L’ambiance est bonne enfant. On déconne, on se ravitaille, on papote. On avance au pas. On se doute bien que quelque chose de pas normal se produit, un hélicoptère tourne autour de nous, fait du stationnaire, descend, se pose et repart. Un mec a gravement chuté et s’est transpercé la cuisse avec une branche. On repart tout doux. Le rythme longue marche/quelques roulages et descente reprend. L’avantage de marcher est qu’on peut apprécier la paysage autour de soi. Quelque soit l’endroit ou l’on se trouve ici tout est grandiose et beau. L’effort est toujours récompensé par ce que l’on voit. Quitte à avancer au pas autant s’en prendre plein les mirettes !! Ceux qui sont venus pour le chrono à outrance n’auront peut-être pas vu tout ça. On atteint le second ravitaillement au bout de 3h30(21,5Km). Et là patatras …. Vidé … plus rien que de l’eau. Les vagues précédentes nous on tout pris. Des coureurs s’énervent, mais cela sert à rien. Ils feraient mieux de garder leur énergie pour la suite, on a parcouru à peine 20 bornes en 3h30, on a pas fait la moitié. J’ai un gros doute sur mes capacités. Vais-je y arriver ? Est-ce que je suis pas en train de faire une connerie ? D’autant plus que si ce ravitaillement est vidé, les autres le seront aussi. Donc, faut le gérer en autonomie. Fichtre, que j’ai été inspiré avec mes gels !! Je fais le plein d’eau et repart. Toujours les longues montées, quelques magnifiques pistes en descentes à fond en poursuivant les vélos « Un surfeur fou nous poursuit !! ». Je me crois sur une piste de ski. Je godille sans arrêt. Je m’allonge fort en arrière pour passer des murs. Ca passe très bien. Je double même un pilote qui plante sa roue avant et fait un superbe « Over The Bike » pendant que moi je passe en toute sécurité. C’est là que l’on voit la supériorité de nos machines, sur de la descente très très pentue. Je prend mon gel tous les ¾ d’heure comme prescrit. Je n’ai aucune chute de pression, toujours pas de crampes, c’est un produit miracle !! Je ne serai pas en train de me doper à l’insu de mon plein gré moi ?

« Regarde, je te dis qu’il change de jambe,
_tout les combien ?
_compte,
_1,2,3,4,5,6,7,8,9,10…1,2,3 »
On est sur une piste roulante ou je peux lancer la machine dans un bon rythme. J’entend la conversation de deux VTTistes derrière moi, ils restent à m’observer et finiront par me doubler lentement avec une tape sur l’épaule « Chapeau ! Bon courage !! » Arrêt en haut d’une côte pour boire un coup et admirer le paysage autour de moi. J’ai toujours respecté la règle suivante : Une gorgée tous les quart d’heure et après chaque côte.
« Hé, tu fais le Roc avec ça ?
_ comme tu vois
_ …, mais t’es pas un peu dingue ?
_ je crois oui »
Discussion dans une côte.
« Ben finalement je marche dans les côtes comme toi
_ oui et pourtant t’as des pédales, sert toi en
_ peut plus, chui mort… ».
Dans la série des barjos, je reste un moment avec un gars qui roule sur un VTT de 15 ans, rigide, avec freins cantilever!! Il finira après moi heureux. « Je n’ai aucun entraînement et je ne fait que des gros trucs comme çà. Mon objectif est de finir avec mon vieux clou qui reste d’origine, même les pneus sont d’époque ». Etre dans la dernière vague de la dernière course a un avantage auquel on ne s’attend pas : impossible de se perdre. Le parcours est bien fléché, c’est nickel. Mais surtout on suit la piste grâce à tous les déchets laissés par les 14000 coureurs précédents. Le sol est par endroit jonché de tube de gel énergétique (les même que les miens), papiers de barres énergétiques, bidon perdus dans les descentes, chambres à air jetées ça et là… On roule presque dans une décharge à ciel ouvert (j’exagère un poil, mais quand même …). Vachement écolo le VTT. Quand je pense qu’on fait chier les motards vert qui soit disant polluent la nature avec leur motos …..
Troisième ravitaillement … vide (37km). Pire qu’un magasin de Berlin Est dans les années 70. La montre marque 4h40. Certains coureurs craquent vraiment. Ca devient galère pour pas mal. A chaque poste de sécurité, les pick-up embarquent les abandons à la pelle. On est de plus en plus seul. Je continu à pousser comme je peux. 45’ sont passés, vite mon gel (goût banane miam !). On traverse une route pour attaquer un énorme mur. Là il y a du public. Un motard accompagnateur dit à ces collègues « C’est lui regardez, je vous l’avais dit qu’il y avait une trottinette ». Puis à moi « Tu as été dans les dix derniers au début, mais tu reprend des places ». Je reprend des places ? merde alors c’est possibles çà ? Physiquement je tiens le coup. Je sent quand même des douleurs aux jambes mais je continu tranquille. Le truc c’est de ne pas insister dès que la pente est trop forte. On marche et puis c’est tout. C’est maintenant à partir des 5h d’effort que je commence à doubler les mecs dans les côtes en marchant. Tout le monde est crevé. Moi, je maintiend mon rythme de locomotive. Bizarrement, je vais mieux maintenant que pendant la période 3h/5h. Je sais peut-être que j’attaque la dernière heure ? Alors le mental prend le dessus. La montée du lotissement, c’est la dernière grosse côte. Elle achève ceux qui sont encore en vie. Au sommet, des coureurs assis regardent le paysage hagard. Points de cotés, crampes énormes, c’est trop tard pour abandonner, on est presque arrivé, c’est très dur pour eux. 4ème ravitaillement 5h30 (48,5km). J’arrive en hurlant « Je suis toujours là ! » Tout le monde se retourne étonné. … de me voir encore. Ravitaillement vide bien sur. Allez hop, je prend mon dernier gel pour la fin. « On se le termine ce put… de Roc ? » et je repars sans attendre. Je laisse les gars se reposer au ravitaillement (qui n’en ai pas un finalement. C’est plutôt un point d’eau). On descend des pistes très ludiques pour enfin arriver dans la plaine. On retrouve le bitume dans la descente du lotissement. Enfin … Je ne croyais pas autant apprécier le goudron !! Ca glisse tout seul, ça glisse, CA GLISSE !! dérapage de la roue arrière, travers énorme dans un virage rattrapé de justesse en contre-braquage et pied par terre. Qu’est ce qui se passe. L’arrière ne tiens plus ? Je regarde : à plat NON !!! Il ne me reste qu’une demi-heure de course et je suis à plat ? M… !! Le pneu n’est qu’à moitié dégonflé, c’est donc une crevaison « lente ». Je sors ma pompe, gonfle comme un fou, on va essayer de jouer sur la durée. Espérons que ça tienne jusqu’au bout. Je repars. Quelques kilomètres de plat ou je peux enfin pousser. Un cycliste est derrière moi et va y rester longtemps. Je reprend un super rythme (15/20km/h) jusqu’au dernier ravitaillement qui lui n’est pas vide. Le pneu arrière est toujours ok. Je m’arrête pour boire un coup de rouge !! si, si. Je suis tout seul. Un motard ouvreur me dit de ne pas m’inquiéter, je suis loin d’être dernier. Il y en a plein dans la nature derrière moi.(pour info, le dernier classé arrivera 1h15 après moi). Reste 5km de plat dont moitié sur piste cyclable. Plein pot jusqu’au bout. Je roule avec un VTTiste que j’ai rencontré lors du bouchon 4h plus tôt. On se tape la bourre pendant un moment, c’est super. Le jette un coup d’œil régulièrement au pneu arrière, il ne bouge pas. J’ai très mal aux ischio, aux mollets, aux chevilles, mais toujours aucunes crampes en vue. Le coup des dosettes, je n’en reviens pas ! Ca marche leur truc. L’arrivée est là au bout d’une longue ligne droite. Je vais leur faire une démo de poussée. Les 5 dernières minutes, à fond 5 coups de chaque coté. Tout le monde me vois arriver de loin. Le speaker annonce « Le bruit courrait qu’une trottinette était dans la course… c’était vrai il est là !! ». 6h15’57’’ et je passe la ligne. Les coureurs présents me félicitent tous. Photos, vidéos, explications, retrouvailles avec certains, on peut enfin relâcher la pression. Ouf … c’est finit.

PS :
Je suis moins épuisé qu’au critérium d’Allègre. A cause des dosettes ?
Le pneu arrière sera complètement à plat le lendemain matin.
Résultats :
6h15’57’’ pour 58km. (En réel en cause de l’accident, le temps est en fait de 5h30 pour 50km)
Dénivellé +/-1500m
Classement 3087/3541
Classement catégorie Master2 1108/1313.
Poids perdu pendant la course 2kg
Le FB à la pesée chez Vélo-vert : 9,983 kg